Une jeunesse emprisonnée, censurée et muselée…
Après les récents événements tragiques de la semaine dernière, des experts, politiques et
représentants de la société civile ont occupé les plateaux de télévisions/radios pour parler
de la jeunesse et de ce qu’elle est devenue. Une jeunesse terriblement critiquée et
marginalisée à qui on a ôté le droit de parler pour elle-même car absente des médias
traditionnels. Aucun jeune manifestant n’a été invité dans les médias traditionnels pour
parler pour lui-même, d’autres personnes parlent pour lui. Très peu d’organisations dirigées
par des jeunes et dont la mission sert les jeunes n’ont eu un temps de parole conséquent
pour parler de la situation actuelle des jeunes et Dieu sait que organisations de jeunes qui
passent beaucoup de temps avec les jeunes, il y en a pléthore.
Les médias préfèrent donner la parole aux politiques ou à des personnes dont la maîtrise
des aspirations de la jeunesse se limitent à la perception personnelle qu’elles ont de la
question sans pour autant maîtriser le contexte ou avoir des données factuelles.
La jeunesse est emprisonnée, elle est emprisonnée pour avoir posté des émojis sur
Facebook, elle est emprisonnée pour avoir fait un commentaire sur un post Facebook qui
parlait du conflit en Palestine, elle est emprisonnée pour diffusion de fausses nouvelles
etc… La question que nous devons nous poser en tant que Nation et Peuple est: « Est ce
normal d’emprisonner un jeune pour un post sur les réseaux sociaux aussi diffamatoire qu’il
soit? » – un jeune ne doit pas être familier avec l’incarcération à moins que le délit soit un
crime extrêmement grave. Il existe d’autres moyens dissuasifs et d’autres sanctions comme
une amende ou des travaux d’intérêt général.
Maintenant, la jeunesse est même censurée, réseaux sociaux et internet mobile restreints
sous couvert de sécurité intérieure, pénalisant les jeunes entrepreneurs mais aussi privant la
jeunesse du seul espace d’expression de leur voix et opinion que leur offre le cyberespace.
Légitimité? De quelle légitimité parle-t-on?
En tant que jeunes acteurs de développement qui travaillent sur les questions de
développement local et progrès social, la première question à laquelle nous sommes
confrontés quand nous demandons d’être audibles sur le sujet de la jeunesse au niveau des
médias traditionnels et des espaces d’expression en dehors du cyberespace est celle de
notre légitimité. « Vous êtes qui? » – « Qu’est ce que vous avez fait » – « Envoyez nous ce que
vous avez fait » – ces types de questions montrent que au Sénégal, certains ne s’intéressent
à la jeunesse que quand elle sort manifester sinon comment peut on expliquer que des
médias, des experts ou le gouvernement ne sachent pas qu’il y a des organisations dont la
mission sert les jeunes et qui sont 365 jours sur 365 en train d’implémenter des projets pour
les jeunes dans leur autonomisation et développement. Pour parler de la jeunesse en mal, il
y aura pléthore de candidats mais pour aller sourcer et parler des activités faites par la
jeunesse et pour la jeunesse, il n’y a personne. Notre légitimité est questionnée, oubliant par
la même occasion que nous sommes des jeunes et aussi nous sommes des sénégalais et
cela nous confère une légitimité pour parler de nos aspirations en tant que jeune citoyen
sénégalais, svp, arrêter de parler pour nous et nous laisser parler nous-mêmes.
Yaakaar (espoir)… pour ce que ça vaudra…
Aujourd’hui, le monde est en pleine mutation, une mutation accélérée par la crise Covid-19,
le conflit Russie/Ukraine, l’inflation, la montée du populisme et la crise démocratique
mondiale.
Il est également important de noter la baisse de l’influence sur un plan empirique de la
civilisation occidentale, la montée en puissance du bloc BRICS et l’affirmation du réseau
« Global South » font qu’il y ait une redistribution des cartes sur le plan géostratégique.
L’Afrique aussi fait sa mutation, la jeunesse africaine symbolise cette nouvelle dynamique.
Cette jeunesse africaine, interconnectée au monde à travers le cyberespace, est
complètement décomplexée et affirme ses aspirations. C’est le cas au Sénégal où notre
jeunesse est et sera l’élément essentiel de notre développement à condition de créer les
éléments et les instruments pour l’accompagner dans notre quête du progrès
social(Education, Formation, Inclusion, Insertion Professionnelle, Employabilité,
Décentralisation des opportunités, équité territoriale, Interconnexion des Peuples et des
Territoires, Santé et Bien-être).
À toute la classe politique, commençant par le Président de la République qui est le pére de
la nation, en passant par l’opposition et pour finir par la société civile, il est de votre
responsabilité et devoir d’accompagner la jeunesse, d’arrêter de la percevoir juste comme
étant des électeurs.
La jeunesse ne doit plus mourir en exerçant son droit constitutionnel, de toutes les
possibilités qui s’offrent à elle, la mort dans une manifestation ne devrait pas en faire partie.
Oui, elle n’est pas parfaite mais qui de nous l’est?
Posons les fondations d’un dialogue et d’une transmission intergénérationnelle, écoutez les
aspirations de la jeunesse, échangez sur les priorités de développement mais surtout
arrêtez de la caricaturer et de parler pour elle sans elle.
« L’imaginaire des possibles et le narratif des possibilités pour une autonomie et
autodétermination, en route vers l’émancipation sociale et l’affirmation de notre identité à
travers l’esthétique et la transmission, oui nous sommes la jeunesse et nous avons droit au
chapitre »
Les mots énoncés dans l’article représentent le point de vue de l’auteur mais en aucun n’est
une vérité générale. Un grand merci à mon ami Paap Sene pour la publication…
Seydina Mouhamadou Ndiaye
Co-fondateur Consortium Jeunesse Sénégal & Collectif Des Volontaires du Sénégal
@S3ydinaM