La tentative de règlement amiable est obligatoire avant toute saisine du tribunal de commerce. Le non-respect de cette formalité, est sanctionné par l’irrecevabilité de l’action : « l’examen combiné des articles 5 et 41alinéa 5, fait apparaître à la fois, le caractère obligatoire et préalable de la tentative de règlement amiable et la sanction du défaut de cette diligence par l’irrecevabilité de l’action » (Tcom d’Abidjan, 07 novembre 2017, RG n°3555/2017).
L’article 5 de la loi n°2016-1110 du 8 décembre 2016, qui prévoit cette formalité, a été contesté devant le Conseil constitutionnel, qui l’a déclaré conforme à la Constitution : « cette loi a pour objet d’offrir aux justiciables un cadre de règlement par la voie amiable des litiges civils et commerciaux, enrichissant ainsi le système judiciaire d’un mode alternatif de règlement des contentieux susceptibles d’aider au désengorgement des juridictions » (Décision n°CI-2016-165/26-01/CC/SG du 14 juillet 2014 ; décision N° CI-2017-305/21-03/CC/SG du 21 mars 2017).
Conforté par cette légitimité constitutionnelle, le juge veille au strict respect des articles 5 et 41 de la loi de 2016, comme on peut le constater avec ce bref aperçu de la jurisprudence qui est proposé.
1/ Les parties
La tentative se tient entre les parties elles-mêmes, mais des tiers peuvent intervenir. Si elle est faite notamment par les représentants des parties, ceux-ci doivent détenir un mandat spécial à cet effet. Ce mandat doit par ailleurs, être produit à la procédure (Tcom d’Abidjan, 18 janvier 2018, RG n°4244/2017). Le défaut de mandat spécial est sanctionné par l’irrecevabilité de l’action : illustration avec l’avocat qui ne détient pas de mandat (Tcom d’Abidjan, 12 novembre 2025, RG n°2612/2025 ; Tcom d’Abidjan, 08 février 2018, RG n°4006/2017).
2/ La formalisation de la tentative et l’objet du courrier
Le juge exige la preuve de l’accomplissement de la tentative de règlement amiable, d’où l’intérêt de formaliser la tentative par courrier (Tcom d’Abidjan, 4ème chambre, 16 janvier 2018, RG n°3888/2017).
Les parties doivent privilégier la clarté, un courrier qui a pour objet : « invitation préalable à une tentative de règlement amiable » est jugé comme étant une preuve de la tentative (Tcom d’Abidjan, 20 novembre 2025, RG n°3113/2025).
L’importance de l’objet choisi pour le courrier : « il s’ensuit que la demande reversement de fonds, même si elle n’est pas expressément mentionnée dans ledit courrier, fait partie du contentieux de la liquidation de la succession, objet du courrier de tentative de règlement amiable préalable adressé. Il s’en induit que les demandeurs ont donc satisfait à la tentative de règlement amiable préalable » (Tcom d’Abidjan, 27 novembre 2025, RG n°3708/2025).
3/ Le contenu du courrier
La nécessité d’une volonté ferme : « ce courrier ainsi libellé ne peut valoir tentative de règlement amiable, car il est relatif à la communication de documents dont le demandeur entend se servir en vue d’entreprendre des actions futures, en outre, il n’est pas adressé au représentant légal » (Tcom d’Abidjan, 30 octobre 2017, RG n°3365/2017). Le courrier comportant une injonction est un ordre et non une tentative de règlement amiable : « une injonction étant juridiquement un ordre de faire quelque chose, sa juxtaposition avec le terme « amiable » qui la qualifie entraîne une confusion quant à la nature réelle du courrier : un ordre de faire ne pouvant nullement être amiable » (Tcom d’Abidjan, 16 novembre 2017, RG n°3540/2017).
4/ Un courrier pour deux affaires ?
Le courrier ayant servi dans une procédure antérieure, ne peut être réutilisé si la seconde instance n’a pas le même objet que la première : « il résulte de ce qui précède que les deux affaires n’ont pas le même objet, le courrier susvisé ne peut donc faire la preuve de ce que la société a tenté un règlement amiable du litige qui l’oppose à la société avant la saisine de la juridiction de céans » (Tcom d’Abidjan, 15 janvier 2018, RG n°4126/2017). La continuation d’une instance devant le même juge : « L’instance en liquidation de l’astreinte peut être considérée comme la continuation de l’instance antérieure si le juge des référés qui l’a ordonnée s’est réservé le droit de la liquider ; si tel n’est pas le cas, la liquidation de l’astreinte donne naissance à un nouveau litige dont la résolution, comme en l’espèce, ressortit à la compétence du juge fond, différent du juge des référés. Dès lors l’action est irrecevable » (Tcom d’Abidjan, 08 février 2018, RG n°4145/2017).
4/ Le délai raisonnable pour saisir le tribunal
La partie à l’initiative de la tentative, peut saisir le tribunal en cas d’échec ou d’accord partiel. L’échec comprend le cas où la partie adverse ne répond pas au courrier. L’action intervenant un mois après le courrier resté sans réponse, est jugée recevable (Tcom, 4ème chambre, 16 janvier 2018, RG n°4144/2017).
L’attente de l’expertise ne constitue pas un échec de la tentative de règlement amiable : « En matière d’indemnisation de préjudice corporel, l’expertise, si elle n’a pas été faite auparavant, est nécessaire et que c’est au vu des résultats de cette expertise, qu’éventuellement, un accord amiable d’indemnisation peut être trouvé entre la victime et l’assureur » (Tcom d’Abidjan, 09 novembre 2017, RG n°2837/2017). Cette affaire était relative à une action en responsabilité médicale.
5/ Les litiges pour lesquels la formalité n’est pas exigée
L’action en réparation à la suite d’un accident de la circulation : le Code CIMA, texte spécial dérogatoire du droit commun, édicte tant des règles de fond que des règles de forme qui ne prévoient pas de tentative de conciliation préalablement à la saisine de la juridiction de céans, telle que voulue par les articles 5 et 41. Le demandeur n’a pas à initier une démarche tendant au règlement amiable du litige avant de saisir le tribunal (Tcom d’Abidjan, 09 févier 2018, RG n°4397/2017).
Plus généralement à toutes les actions, pour lesquelles il est prévu une procédure spécifique. On peut citer l’action en résiliation du bail commercial avec la mise en demeure préalable (Tcom d’Abidjan, 26 novembre 2025, RG n°4112/2025), l’action en opposition à une injonction de payer avec une conciliation (Tcom d’Abidjan, 5ème chambre, 02 décembre 2024, RG n°2936/2024).