Les violences de jeudi ont fait quatre morts et cinq blessés dans les rangs de la police, selon un responsable du syndicat national des policiers haïtiens, cité par l’AFP. Deux sous-commissariats ont été incendiés, a-t-il ajouté. Des tirs nourris ont été entendus le même jour dans plusieurs quartiers de la zone de Port-au-Prince, les forces de sécurité tentant de repousser les assaillants qui ont visé notamment des commissariats, l’académie de police et d’autres sites stratégiques comme l’aéroport international Toussaint-Louverture. Établissements scolaires, universités et diverses institutions publiques comme privées ont interrompu leurs activités alors que des centaines de personnes se sont réfugiées chez elles. Des étudiants de l’université d’État d’Haïti ont été pris en otage avant d’être relâchés, a indiqué à l’AFP le doyen de la faculté d’agronomie Jocelyn Louissaint. Au moins un étudiant a été blessé par balle dans cette attaque, selon lui.
Plusieurs compagnies aériennes ont annulé leurs vols domestiques et internationaux après que des projectiles ont touché des avions et des parties d’un terminal de l’aéroport Toussaint-Louverture. La compagnie haïtienne Sunrise Airways a annoncé dans un communiqué avoir « décidé de suspendre tous ses vols jusqu’à nouvel ordre, afin de ne pas mettre en danger les voyageurs, les équipes au sol, les équipages ou les aéronefs ». Les compagnies américaines Spirit Airlines et American Airlines ont également annulé leurs vols en provenance et à destination de Port-au-Prince.
Dans une vidéo diffusée jeudi sur les réseaux sociaux, le chef de gang Jimmy Chérisier, alias « Barbecue », a affirmé que « tous les groupes armés vont agir pour obtenir le départ du Premier ministre Ariel Henry ». « Nous allons utiliser toutes les stratégies pour aboutir à cet objectif. Nous revendiquons tout ce qui se passe dans les rues en ce moment », a-t-il ajouté, quelques heures après le début des attaques.
Ariel Henry s’engage organiser des élections en 2025
Depuis l’assassinat en 2021 du président Jovenel Moïse, Haïti fait face à une grave crise politique, sécuritaire et humanitaire. Des gangs armés ont pris le contrôle de pans entiers du pays et le nombre d’homicides a plus que doublé en 2023. Au pouvoir depuis 2021, Ariel Henry aurait dû quitter ses fonctions début février. Mercredi, lors du sommet de la Communauté des Caraïbes, il s’est engagé à organiser des élections en 2025, comme il l’avait déjà fait en 2022… Où il avait promis de quitter le pouvoir le 7 février 2024. Mais selon la Caricom, cette fois-ci c’est la bonne.
« Lors de nos discussions, particulièrement avec le Premier ministre Ariel Henry, des concessions ont été faites pour avancer sur le processus politique, y compris organiser des élections générales pour restaurer le gouvernement en accord avec la Constitution, pas plus tard que 31 août 2025, a indiqué Philip Davis, Premier ministre des Bahamas. Pour cela, nous nous sommes mis d’accord pour mettre place une équipe chargée de définir les besoins. Elle sera dirigée par la Caricom et les Nations unies avec le soutien de partenaires – le Canada, les États-Unis et l’Organisation des États Américains. »
Le Kenya et Haïti signent un accord pour l’envoi de la mission
Ces violences coïncident avec le 20e anniversaire du coup d’État qui avait chassé le président Jean-Bertrand Aristide du pouvoir et interviennent au moment où Ariel Henry se trouve au Kenya. Le Kenya et Haïti ont signé ce vendredi 1er mars un accord pour l’envoi de policiers dans l’île. Pour tenter d’aider la police dépassée face à la violence des gangs, le Conseil de sécurité de l’ONU a donné en octobre son accord pour l’envoi en Haïti d’une mission menée par le Kenya.
Le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres a insisté jeudi sur l’importance de parvenir à une « solution politique » en Haïti. «Sans solution politique, le problème ne sera jamais résolu », a déclaré Antonio Guterres à son arrivée sur l’archipel de Saint-Vincent-et-les-Grenadines, petit pays des Caraïbes situé au sud-est d’Haïti.
Le mois de janvier 2024 a été « le plus violent depuis plus de deux ans » en Haïti, selon le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme qui déplore que la « situation déjà désastreuse » se soit « encore détériorée, dans un contexte de violence incessante et croissante des gangs ». L’ONU a lancé mardi un appel aux dons de 674 millions de dollars pour aider 3,6 millions de personnes en Haïti, pays confronté à l’une des plus graves crises alimentaires au monde.
Via AFP