Opinion : Elon Musk, l’immigré qui dénonce les immigrés ; quand la satire devient réalité

Elon Musk, l’homme qui nous a apporté des voitures électriques futuristes, des fusées réutilisables, et… des tweets chaotiques, vient de prouver une fois de plus qu’il maîtrise l’art du double discours. Lui, l’immigré sud-africain devenu l’un des hommes les plus puissants des États-Unis, s’est découvert une nouvelle passion : dénigrer les autres immigrés. Oui, ceux-là même qui, comme lui, ont traversé les frontières à la recherche d’un avenir meilleur.

Sa dernière cible ? Les Haïtiens. Oui, parce que, visiblement, la conquête de Mars ne suffit plus. Il faut aussi conquérir les voix politiques. Et quoi de mieux que de propager des rumeurs douteuses sur des immigrés pour y parvenir ?

Lundi 9 septembre dernier, Andrew Surabian, stratège politique autoproclamé et expert en fake news virales, nous a gratifiés d’un tweet sorti tout droit d’une dystopie hollywoodienne : 20 000 Haïtiens envahissant une ville de l’Ohio, détruisant tout sur leur passage, et – tenez-vous bien – tuant et mangeant des animaux domestiques. Et tout cela, bien sûr, grâce à Kamala Harris, la « tsariste des frontières », qui, dans un élan de générosité, a ouvert les portes de l’Amérique à plus de 100 000 migrants haïtiens. Parce que, selon Surabian, rien ne dit « politique d’accueil » comme un bon barbecue de chats et de chiens.

Mais le clou du spectacle est venu d’Elon Musk. L’homme qui a bâti un empire grâce à l’ingéniosité américaine (et à quelques subventions fédérales), a retweeté l’histoire avec un commentaire subtilement apocalyptique : « Votez pour Kamala si vous voulez que cela arrive à votre quartier ! ». Oui, vous avez bien lu. Le même Musk qui, rappelons-le, a franchi les frontières pour devenir le génie visionnaire qu’il est, s’attaque maintenant à ceux qui osent rêver d’un avenir meilleur.

Ironique, n’est-ce pas ? Elon, l’immigré modèle, qui décide que les autres immigrés ne méritent pas le même rêve américain. Il est vrai que la route vers la Silicon Valley n’est pas pavée de passeports sud-africains pour tout le monde. Apparemment, seuls ceux qui lancent des satellites peuvent prétendre à une place dans ce club très sélect.

Et pourquoi s’arrêter là ? Après tout, si l’on croit aux scénarios de Surabian et Musk, ces Haïtiens ne sont pas seulement là pour prendre nos emplois, mais aussi pour transformer nos chiens en ragoût. Vous savez, parce que lorsqu’on quitte un pays ravagé par la pauvreté et les catastrophes naturelles, la première chose à laquelle on pense est de raser une petite ville tranquille de l’Ohio.

Il est intéressant de noter que Musk, le chantre de l’innovation et de l’exploration spatiale, ne se soucie pas vraiment de la véracité des faits qu’il partage. Après tout, qui a besoin de preuves quand on a plus de 190 millions de followers prêts à prendre ses tweets pour des vérités absolues ? Pourquoi s’encombrer de nuances ou de débats constructifs quand une bonne vieille diatribe populiste fait parfaitement l’affaire ?

Ce tweet n’est pas seulement une attaque contre Kamala Harris ou les Haïtiens. C’est une attaque contre l’intelligence collective. Elon Musk, cet homme qui nous promet l’avenir dans les étoiles, semble oublier qu’il fait campagne pour un avenir sur Terre où la peur des autres est la seule ligne directrice.

Alors, chers lecteurs, si un jour vous êtes tentés de voter pour Elon Musk (parce qu’avouons-le, il pourrait bien se présenter un jour), souvenez-vous que même l’ingénierie la plus brillante ne vous protège pas des raccourcis intellectuels. Et qu’il ne faut pas toujours croire à tout ce qui brille, même si ça vient d’une fusée.

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