À quelques jours de la 30e Conférence des Parties sur les changements climatiques (COP30), qui se tiendra du 10 au 21 novembre à Belém, au nord-est du Brésil, les regards se tournent vers l’Amazonie, la plus grande forêt tropicale du monde, aujourd’hui menacée de basculer dans une zone de dégradation irréversible.
S’étendant sur neuf pays d’Amérique du Sud et couvrant près de sept millions de km², la forêt amazonienne joue un rôle essentiel dans la régulation du climat mondial et abrite une biodiversité exceptionnelle. Mais selon le chercheur franco-péruvien Jhan-Carlo Espinoza, de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et membre du collectif scientifique Science Panel for the Amazon, cette région « se rapproche dangereusement du point de non-retour », où les effets combinés de la déforestation et du réchauffement climatique deviendront irréversibles.
Déjà, le sud du bassin amazonien, notamment en Bolivie et au Brésil, subit des sécheresses d’une intensité et d’une durée inédites, transformant progressivement la forêt en savane. En parallèle, le nord connaît des crues extrêmes et des inondations majeures, illustrant l’intensification du cycle hydrologique. Ces dérèglements ont des conséquences dramatiques sur le cycle de l’eau et la capacité d’absorption du carbone de la forêt, souvent qualifiée de « poumon vert de la planète ».
Entre 17 et 20 % de la surface forestière, l’équivalent de la superficie combinée de la France et de l’Allemagne, ont déjà disparu, des chiffres jugés alarmants, tandis que 17 % supplémentaires sont fortement dégradés, préviennent les scientifiques, ajoutant que si la déforestation franchit le seuil de 40 %, les équilibres écologiques et climatiques du bassin pourraient être irréversiblement rompus.
Cette situation menace également la sécurité hydrique et alimentaire des pays voisins. En effet, la moitié des précipitations en Amazonie proviennent de l’évapotranspiration des arbres, un processus vital qui humidifie l’atmosphère et influence le climat jusqu’aux Andes tropicales et au sud du continent.
Face à cette urgence, les scientifiques appellent à des politiques de « déforestation zéro », à l’abandon des projets d’infrastructures perturbant les écosystèmes fluviaux, et à la protection renforcée des territoires autochtones, gardiens historiques de la forêt. Ces derniers, réunis en juin à Brasilia, ont plaidé pour un accès direct aux financements climatiques et une meilleure représentation dans les instances internationales, un enjeu central de la COP30.
La tenue de cette conférence mondiale à Belém, aux portes de l’Amazonie, revêt une portée symbolique forte : celle d’un appel à l’action pour sauver la plus vaste forêt tropicale de la planète, avant qu’elle n’atteigne le point de non-retour.
